Shantae & the Pirate’s Curse est le troisième volet de la série originale développée par WayForward. Il est étrange de voir une série être conclue en 12 ans (en attendant Half-Genie Hero). Eh oui! Le premier volet fut lancé sur Game Boy Color en 2002 et malgré le peu de ventes, Shantae a été acclamé par la critique et est considéré comme un exploit technique pour être l’un des jeux les plus complets de sa console. Shantae : Risky’s Revenge a été lancé en 2010 sur DSiWare et a reçu un aussi bel accueil. N’ayant pas joué aux jeux précédents, je me lance en territoire inconnu. À l’abordage!

Shantae and the Pirate’s Curse reprend là où les joueurs ayant terminé Risky’s Revenge l’ont laissé. La demi-génie a perdu ses pouvoirs suite à sa dernière confrontation contre Risky Boots. Après une attaque d’Ammo Baron, le monde de Sequin Land pourrait bien être envahi par les ombres alors que Risky Boots informe Shantae d’un mal ancien qui pourrait revenir d’outre-tombe s’il n’est pas contrôlé. N’ayant pas le choix de coopérer, Shantae et Risky navigeront vers les îles avoisinantes afin de stopper la résurrection de ce mal.

Entre quelques titres qu’on peut oublier et d’autres jeux qu’on peut facilement apprécier grâce au talent du studio californien, Shantae arrive à un moment où on se pose la question existentielle. Avait-t-on réellement besoin d’un autre platformer dans le style de Metroid? Avec Xeodrifter de Renegade Kid et Axiom Verge de Tom Happ qui arrivent l’an prochain sans oublier l’excellent SteamWorld Dig d’Image & Form de la Suède et Guacamelee de Drinkbox Studios au Canada l’an dernier, le genre déborde… alors qu’on attend le retour de LA reine. Personnellement, je n’ai aucun problème puisque j’adore le genre mais j’aime surtout les titres qui rendent hommage à la source et il est vrai que je souhaite savourer le plat principal malgré les trop nombreuses collations comme Strider et Guacamelee. Cependant, Shantae puise dans le style Metroid et Castlevania depuis le premier volet ce qui est donc légitime. La critique tient compte du fait que je n’ai pas joué aux volets précédents.

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L’exploration des donjons sont généralement les meilleures portions du titre.

Vous l’aurez tout de même compris: Shantae & the Pirate’s Curse est un platformer en perspective 2D où on doit parcourir les zones à l’aide des mécaniques proposées dans le jeu. Au début, nous avons la possibilité de se déplacer de gauche à droite (le D-Pad est recommandé), sauter, ramper et attaquer en donnant un coup de fouet avec les cheveux. Il est possible de donner le coup de fouet lorsque le personnage est accroupi. Bien sûr, il y a un certain délai lorsqu’on effectue l’attaque mais le tout répond extrêmement bien. La mécanique d’attaque est naturellement représentative de Castlevania ou, dans un côté plus cartoon, Earthworm Jim Le jeu nous proposera par la suite de nouvelles mécaniques comme le pistolet (avec des balles infinies) pour activer certains interrupteurs ou abattre des ennemis. Cependant, il faut se méfier des obstacles comme les ennemis dans le niveau puisque Shantae ne se joue pas exactement comme le platformer typique en termes de combat.

Lorsque vous frappez un adversaire, vous verrez un -1 ou -5. Les ennemis ont un certain nombre de point de santé que vous ne pouvez observer mais à force d’apprendre comment les combattre, vous pourrez éviter les ennuis. Si un coup de cheveu fait 5 de dégâts, un tir de pistolet fait 1 ce qui est peu avantageux sauf si vous voyez un ennemi arriver à distance et que vous effectuez la mécanique de saut par-dessus l’IA pour ensuite le frapper avec la mécanique de coup de cheveu. Les pouvoirs spéciaux comme le pistolet sont cachés dans des simili-donjons à la Kid Icarus ou Castlevania. Généralement, vous devez explorer une île pour ensuite trouver le donjon après une série de quêtes qui font plus ou moins de sens et c’est là que je dois faire mention de l’écriture.

Malgré son bon vouloir d’avoir un ton humoristique (en plus de sous-entendus et un gag sur Star Wars que j’ai particulièrement apprécié), Shantae and the Pirate’s Curse semble s’égarer entre faire rire et informer le joueur de son objectif précis. Bien sûr, il est important de considérer les objectifs réels et parler à chaque personnage et prendre des notes. Le jeu est très rétro dans son approche et il n’y a pas de point de contrôle sauf dans une séquence où on doit transporter un personnage non-jouable (NPC). Il est aussi rétro dans sa méthode de sauvegarde alors que le joueur doit appuyer sur A à côté d’un bonhomme habillé en vert. Le problème est qu’il n’y pas de point contextuel (un symbole ou autre) contrairement à certaines portes (même encore, on comprend que d’appuyer Haut sur le D-Pad nous permet de traverser la porte). Le plus gros problème de design (et je maintiens le mot design) est le fait que certains passages sont plus ou moins claires quant à l’obtention d’objets ou autre. Je me souviens très bien que dans un jeu comme Wario Land 4 (ou même Metroid: Zero Mission), les passages secrets ou les secteurs spéciaux passaient en fondu pour nous dévoiler un chemin logique ce qui prouve que le jeu a été pensé. On peut aussi penser à Super Metroid alors que le jeu nous donnait accès aux bombes (qu’on voyait au travers des murs) ou même à une visière à rayons-x pour mieux voir notre parcours. Or, j’ai l’impression que WayForward n’a peut-être pas cru bon de rendre certains passages logiques ou ajouter une petite étincelle surtout quand on parle d’un jeu où l’exploration est nécessaire.

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Il vous faudra user de vos habiletés afin d’affronter les boss. Leur design est impressionnant mais ils ne sont pas forcément tous farouches.

Souvent, je me suis perdu à cause de l’écriture ou même le design où j’ai réellement chuchoté « WTF » ce qui est jamais un bon signe avec des sorties qui ne semblaient pas l’être… Connaissant le style Metroid, il devrait y avoir un petit indice logique pour un couloir ou autre sur la carte… Malgré tout, j’ai fini par m’en sortir en reparlant à un maximum de personnages pour réaliser à quel point CHAQUE conversation ou détail de l’environnement doit être scruté à la loupe ou au cheveu si je me permets d’être réaliste dans mon point de vue. Par exemple, je devais trouver des tombes, entamer l’interaction pour que mon avatar utilise des lunettes à rayons-x afin de dessiner les momies. Trouver les deux premières tombes, c’était facile mais la troisième laissait un indice peu évident par rapport à un personnage nommé Sky… Il fallait s’en souvenir.

Le jeu fait tout de même fort au niveau variété avec une séquence d’infiltration où notre inventaire est temporairement hors d’usage. Les donjons sont également bien faits afin de tester nos nouveaux objets un peu à la manière d’un Zelda mais j’ai l’impression que les arènes d’avant-boss sont de trop sans être un mauvais test pour le joueur avant d’affronter l’ennemi principal. Bien qu’on revoit généralement les mêmes éléments, ceux-ci sont intégrés de façon différentes afin de vous démontrer les capacités des objets et c’est sans oublier l’interaction avec les trucs de l’environnement et quelques briques cachées à frapper avec les cheveux.

À partir de l’écran tactile, on a accès aux objets clés dont la magie noire qui vous est introduite dès le début de la partie et qui sera un élément crucial pour la complétion du jeu alors que vous devrez vaincre des créatures mutantes et récupérer la magie grâce à la lampe. Cette mécanique est introduite de la bonne façon mais c’est à vous de scruter les endroits et à prendre des notes. On peut aussi voir les pouvoirs et l’armement récupéré tout au long du jeu. Certains de ces pouvoirs sont à se procurer via un magasin sur l’île principale en plus des améliorations pour votre armement récupéré dans les donjons. Les ennemis, chandeliers et vases peuvent faire tomber des pierres précieuses converties en monnaie ce qui vous permet donc de l’échanger pour des objets à utiliser comme des boucliers temporaires (généralement un boulet épineux), des objets de guérison, etc. Par ailleurs, votre énergie est divisée en cœur et chaque cœur contient quatre points de vie. Vous pouvez avoir de nouveaux cœurs en trouvant des calmars rouges bien qu’il vous en faut quatre pour constituer un nouveau cœur. Le tout est effectivement fait via l’île principale. Mention spéciale aux objets d’amélioration pour les cheveux basés sur les produits nettoyants. Ces objets accélèrent la vitesse d’attaque ou la puissance selon l’amélioration choisie. Bien sûr, les améliorations sont optionnelles mais vous pourriez bien faire face à un mur si vous les ignorez puisque les ennemis deviennent de plus en plus redoutables. Il y a donc une réelle courbe d’apprentissage à considérer et bien que les boss ont des attaques bien précises à éviter, ils seront malgré tout impardonnables si vous n’avez pas les améliorations. Je vous disais que les arènes d’avant-boss étaient déjà cruelles… je vous permets donc d’imaginer la frustration possible.

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WayForward se laisse aller dans son délire habituel de nous offrir des séquences visuelles impressionnantes. Le Dodongo peut aller se rhabiller pour une fois.

Je me dois aussi de faire part d’un « glitch » gênant : lors de mon passage sur une île vers le 3/4 du jeu, on peut apercevoir un certain type d’ennemi qui n’hésite pas à franchir les mêmes pentes glissantes que notre avatar. Or, cet ennemi peut attaquer durant la glissade : si Shantae a 6 points de vie maximum, la partie devrait se terminer mais elle devient finalement invincible et la musique s’arrête. C’est comme si Shantae était morte-vivante. Une fois la salle franchie, tout revenait à la normale et les morceaux de cœurs étaient conservés. J’espère que WayForward fera la mise à jour nécessaire. J’ai d’ailleurs contacté le studio à ce sujet et j’ignore si le défaut a été rapporté.

Chaque île présente des thèmes différents et une difficulté accrue en plus d’une nouvelle armée d’ennemis à affronter donc assurez-vous de sauvegarder constamment afin d’éviter le piège de devoir tout refaire ce qui pourrait vous décevoir grandement. Croyez-moi, ça m’est arrivé et j’ai du prendre une pause puisque je me sentais coupable. L’égo en prend un coup. On ne peut pas blâmer WayForward de présenter un jeu difficile mais il y a des pics de défi assez surprenants. Étrangement, la 3D aide à mieux déceler les éléments de décor qui peuvent fausser l’imagination et démontrer de façon plus clair le chemin à suivre. Bien sûr, le contrecoup : activer la 3D révèle le design plutôt bizarre pour les personnages avec les atouts des personnages féminins accentués et les défauts des persos masculins frôlant la caricature mais le débat n’est pas à faire et le tout ne m’a pas posé problème. Cela pourrait être un petit fardeau pour d’autres joueurs. Visuellement, le jeu est superbe bien qu’on se retrouve avec un style tout de même classique et fluide.

Je me permets de faire mention de la magnifique bande sonore du jeu composée par Jake Kaufman. Eh oui, encore lui! Après Ducktales Remastered en 2013 et Shovel Knight cette année (qui a collaboré avec Manami Matsumae), le revoilà à la composition et je peux vous dire que ce gars mérite une place plus grande dans l’industrie. Il trouve la note pour chaque niveau et je ne peux choisir quelle musique j’ai préféré. Autant David Wise réussit son pari pour Donkey Kong Country Tropical Freeze… Jake Kaufman a deux bandes sonores de plus dans le portfolio cette année.

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Rendu à ce point, vous entendrez peut-être la meilleure musique du jeu… Subjectif!

Tel que vous l’avez lu, Shantae and the Pirate’s Curse n’est pas un jeu sans faute. Il n’est cependant mauvais… c’est même un bon jeu pour ce qu’il offre. Avec une campagne qui peut s’étaler sur un bon 10 heures sans oublier les objets à ramasser et le New Game + (sous le nom de Pirate Mode) pour 20$ (j’ai terminé le jeu en 8h 22 à 87%), The Pirate’s Curse est définitivement un bon ajout sur la 3DS. J’aurais bien aimé voir des passages un peu plus logique au niveau du level design mais l’utilisation de la 3D vient généralement aider le joueur ce qui est surprenant pour un jeu en perspective 2D. Superbe ambiance musicale et direction artistique farfelue, WayForward a le talent nécessaire pour nous sortir un véritable gros titre en puissance un jour ou l’autre.

Verdict: Si vous êtes un fan du style de Metroid/Wario Land, vous serez effectivement tentés par ce titre qui respecte le genre.

Points positifs:

  • Trame sonore absolument magnifique! Excellent boulot par Jake Kaufman!
  • Direction artistique qui amène une variété dans les décors et ennemis!
  • Excellente présentation des objets de pirates!
  • Une des meilleures utilisations de la 3D pour un platformer 2D!
  • Les contrôles répondent bien, le joueur est le seul responsable de ses erreurs!
  • Difficulté bien corsée!

Points négatifs:

  • Quelques soucis de design qui font mal à la logique…
  • L’écriture s’égare entre l’humour et l’information pour les missions…
  • La 3D est presque nécessaire pour mieux comprendre le design…
  • Un glitch gênant qui, j’espère, sera corrigé…

Fiche:

  • Nom: Shantae and the Pirate’s Curse
  • Développeur/Éditeur: Wayforward
  • Genre: Platforme 2D
  • Disponible sur: Nintendo 3DS et Nintendo Wii U (à venir en hiver)
  • Cote ESRB: E10+ (10 ans et +)
  • Langue: Anglais seulement

La critique de Shantae and the Pirate’s Curse a été rendu possible grâce à un code fourni par l’éditeur à des fins journalistiques seulement.