Avec l’importance des définitions, il est primordial de clarifier les genres avant d’énoncer d’autres éléments. On peut utiliser les éléments secondaires en correspondance avec le thème désiré. Le mandat du jeu reste d’offrir une expérience mécanique qui fonctionne. La clé se cache-t-elle dans les Souterrains de la mythologie grecque? Une clé chtonienne vers le Panthéon, c’est certain!

Hades fut évalué à partir d’une version numérique achetée par l’auteur sur Steam. Bien que je n’aie pas atteint la surface après plus de 20h, je tenais à offrir mon verdict.

Hades est le plus récent jeu de Supergiant Games. Après Bastion, Transistor et Pyre (tous acclamés par le public, les critiques et commentateurs), on se demandait bien où le studio de San Francisco allait s’aventurer. Ce que nous avons ici, c’est un jeu d’action à perspective isométrique avec des principes de type roguelite sous le thème de la mythologie grecque. Avant que vous sachiez où sont mes préférences, je n’ai jamais pris le temps de jouer à un titre de la part de Supergiant Games ce qui est, pour plusieurs, un affront. Je reconnais tout de même leur qualité et j’ai Bastion et Transistor dans ma bibliothèque Steam. Hades est donc le premier jeu de ce studio auquel je joue, envoyez-moi en Enfer.

Si vous êtes familiers avec la mythologie grecque, vous connaissez les Enfers ou le royaume des morts, les moins familiers connaissant le terme anglophone Underworld alors qu’Hadès en est le dieu alors que ses frères, Zeus et Poséidon, règnent dans les cieux et les mers respectivement. Hadès, dans la culture populaire, a souvent été personnifié comme un antagoniste (Hercules de Disney, God of War de Santa Monica, Kid Icarus : Uprising de Sora Limited). Il ne faut pas confondre Thanatos avec Hadès alors que ce premier est la personnification de la mort, le dernier étant le dieu des morts. Pourtant, c’est l’erreur que Kid Icarus fait de manière volontaire afin de distinguer Hadès et Thanatos dans la hiérarchie maléfique. Par ailleurs, Thanatos a beau être la personnification de la mort, il n’en reste pas moins un personnage généralement attirant dans la mythologie.

En tant que Zagreus, le fils d’Hadès et prince des Enfers, vous tentez d’échapper les Souterrains afin de rejoindre l’Olympe et siéger aux côtés de vos oncles, tantes, cousins et cousines. Vous êtes semimmortel (concept de mort permanente ou semi dans ce cas-ci avec la thématique de l’Underworld), vous combattez des hordes de monstres des Enfers (jeu d’action), les salles et arènes des différentes portions de l’Underworld changent peu importe le parcours bien qu’elles soient souvent créées par l’humain (génération semi-procédurale) et vous améliorez vos habiletés selon les objets que vous récoltez (méta-progression). Le jeu est défini par son système de combat et non par les caractéristiques roguelite qui le composent soit les trois piliers de la définition mise en place par Rogue Legacy : un degré de mort permanente, un certain degré de génération procédurale et la méta-progression. Inutile de vous rappeler que roguelike est un genre alors que roguelite n’en est pas un et évaluer un jeu uniquement pour ses caractéristiques roguelite serait un affront. C’est aussi pire que de qualifier un jeu roguelite en tant que roguelike alors que c’est totalement faux si on se fit à l’interprétation berline par rapport aux composantes qui ont formé des jeux comme Rogue, Nethack ou Angband : la permamort, génération procédurale, le tour par tour, gestion de ressource, le système de grille et, d’importance moindre, le système de présentation de style ASCII. Pour faire court, roguelike est « like-rogue » ce qui fait que c’est un genre, fin de la discussion : faut donc dire roguelite. Cessons donc de diluer les définitions des genres de jeux, merci! Revenons dans l’Underword.

Je dois affirmer que le concept de permamort fonctionne de belle manière avec la présentation de la mythologie grecque comme nous sommes le prince des Enfers et les Enfers sont là où les âmes semblent y trouver repos ou conflit. Ce qui est intéressant également, c’est qu’on voit un Underworld qui règne dans l’opulence ce qui permet au concept de méta-progression d’exister visuellement en plus de distinguer l’Underworld du monde ténébreux présenté par Disney ou la Cité des Âmes dans Kid Icarus : Uprising. Cela amène une synergie entre le thème et les principes. Dans le cas de l’élément du hasard ou la génération procédurale, on peut imaginer que l’Underworld est un véritable labyrinthe à naviguer peu importe l’âme qui y entre ou en ressort. En résumé, les concepts de semimmortalité, de génération semi-procédurale et de méta-progression sont adaptés depuis les Souterrains soit le royaume des morts, le labyrinthe des esprits qui y naviguent et la richesse des dieux qu’on y retrouve. La synergie entre les éléments de type roguelite et l’Underworld est un coup de génie de la part de Supergiant. Mais Hades ne serait rien sans sa jouabilité et l’addition des concepts et éléments roguelite qui propulsent le jeu vers un plus haut niveau ce que nous observerons un peu plus tard.

Tout d’abord, il faut savoir qu’Hades fut un jeu lancé sur le programme Accès Anticipé sur Steam suivant une exclusivité temporaire sur Epic Games Store en 2018. Ce qui est ironique, c’est que le dernier grand jeu avec des éléments roguelite fut aussi sur ce même programme et les comparaisons ne seront pas mauvaises pour le consommateur informé. Je fais effectivement référence à Dead Cells par Motion Twin, le studio français ayant réussi un tour de force en réglant la vaste majorité des problèmes qui composent les jeux aux éléments roguelite. C’est tout à fait normal puisque plusieurs utilisent l’aspect roguelite pour compenser autour d’un manque de finesse, de créativité ou de moyen. Ce que Dead Cells avait, c’était un excellent système de combat avec des niveaux semi-procéduraux et une fluidité dans les mouvements du personnage sans oublier les augmentations permanentes des équipements au hasard. Cela dit, Dead Cells et Hades sont deux jeux différents : l’un se contrôle en perspective 2D semblable à Metroid alors que l’autre est similaire à ce qu’on retrouve dans les jeux classiques comme Final Fantasy, Disgaea et autres. Étrangement, l’aspect isométrique est quelque chose qui se retrouve dans la signature de Supergiant depuis Bastion, leur premier titre depuis la fondation du studio.

Dans Hades, vous contrôlez votre personnage selon la perspective isométrique et utilisez une arme selon votre choix bien que votre arme de départ soit Stygius, une épée simple et efficace. Alors que vous progressez peu importe la victoire ou la mort, vous pourrez déverrouiller d’autres armes comme la lance éternelle Varatha, le bouclier du chaos Aegis ou l’arc perçant Coronacht. Selon vos passages, vous allez récupérer différentes récompenses et les clés chtoniennes seront nécessaires afin d’obtenir l’arsenal complet. Ces mêmes clés chtoniennes sont utilisées pour débloquer des talents qui modifient des aspects à la jouabilité et vous aurez le choix entre différentes fonctions qui peuvent être améliorées avec des cristaux ténébreux de manière permanente. D’autres types d’objets seront récoltés et mis en banque comme des pièces à dépenser dans la boutique de Charon, des gemmes pour faciliter l’extension de fontaines ou autres éléments durant votre progression et j’en passe. Dans l’Underworld, Charon est le nocher du fleuve Styx où les âmes ayant payé leur droit de passage pouvaient aller reposer dans le royaume des morts.

D’autres éléments jouent des rôles différents et ceux-ci sont définis par les membres du Panthéon Olympien. Ils offriront à Zagreus différentes bénédictions qui servent d’améliorations temporaires et sont renforcées avec des éléments différents selon votre progression dans les chambres. Chaque membre du Panthéon est défini par un logo coloré. Ces améliorations sont essentiellement des modifications passives et actives appliquant des affixes et suffixes à vous-même ou vos ennemis selon les attaques. Vous pourriez donc avoir une combinaison entre les pouvoirs du tonnerre de Zeus tout en prenant un style plus défensif à partir des bénédictions d’Athéna. Peut-être préférez-vous distancer vos ennemis avec les torrents de Poséidon tout en combinant les chances de coups critiques grâce à Artémis et en profitant des déplacements et attaques rapides de la part des pouvoirs d’Hermès?

Il est fort probable que vous ne puissiez pas avoir la combinaison parfaite, mais l’intrigue d’explorer différentes bénédictions comme celles d’Aphrodite, Dionysus ou Arès est la clé de la réussite. Chaque membre du Panthéon est offert au hasard durant votre parcours peu importe l’arme choisie. Chaque bénédiction change la façon que vous jouez, mais il y a aussi une différence visuelle lors de vos attaques ce qui ajoute à la personnalisation. Ça donne une nouvelle identité aux armes et les pouvoirs correspondants et le tout rend le système de combat tout simplement fascinant. C’est sans oublier certaines combinaisons de type duo qui pousse encore plus loin le système du Panthéon. Je vous laisserai les découvrir éventuellement.

Le problème général des jeux offrant un système roguelite est celui d’offrir un personnage anémique, incapable de se battre dès l’ouverture du jeu. Ce problème n’est pas dans Hades. Tout comme l’avatar de Dead Cells, Zagreus est puissant. Il a une attaque de base, une attaque spéciale, une attaque magique, une esquive et une invocation selon le membre dont la bénédiction a été choisie. Toutes les armes suivent ce système et vous pourriez retrouver des marteaux de Dédale, le forgeron. Ces marteaux vont altérer vos mécaniques de base sans retirer la bénédiction choisie. Il y a donc une profondeur incroyable et on a l’impression que ce n’est que la surface.

N’importe quel jeu offrant un système de combat doit d’abord offrir des caractéristiques propres afin de le rendre satisfaisant et éviter la boucle de répétition. Après tout, j’adhère à la philosophie de Bungie qui a réussi à créer la boucle de 30 secondes. Il suffit juste d’incorporer des éléments de qualité. Hades ajoute donc des éléments que nous pourrions comparer à ceux des jeux de combat : des plaquages sur les murs sans oublier la possibilité de détruire des projectiles à même nos attaques. Bien que certains ennemis puissent avoir une couche protectrice comme un bouclier, ce bouclier ne fait qu’augmenter les résistances au vacillement. Vous connaissez sûrement ce concept de stagger ou gib lorsque vous tirez sur un ennemi dans un jeu de tir à la première personne comme Doom alors que le démon peut perdre contrôle de ses attaques. Cette même philosophie est appliquée pour Hades malgré la présence des barres de vies. Le système est juste assez meaty grâce à une excellente présentation visuelle et sonore pour les attaques. On peut facilement embarquer dans le rythme sans se soucier de nos statistiques rendant le tout fluide, précis et au combien glorifiant et viscéral. Rien ne bat un système de combat viscéral, violent et brutal. Bien sûr, ces deux termes ne sont pas présents dans Hades, mais la récompense est là à chaque arène pour nous permettre d’être plus fort lors de l’arène suivante et ce pour le reste de la progression.

Maintenant que vous savez que le système de combat est excellent et que les éléments roguelite le bonifient faisant de cette expérience un véritable tour de force mécanique, qu’est-ce qui peut bien rendre Hades encore plus intéressant? C’est là qu’on arrive avec la signature propre de Supergiant. On parle ici d’un jeu dont la narration est si bien écrite qu’aucun personnage n’est ennuyant. Des petits effets vocaux sont ajoutés pour les dieux de l’Olympe les rendant plus fantastiques encore. Chaque personnage a sa personnalité et cela inclut Zagreus alors qu’il s’oppose lui-même à son père qui gère l’entrée des âmes dans les Souterrains de l’Enfer. Des personnages secondaires sont également divertissants et ils auraient facilement pu être mis de côté. Je pense notamment à Skelly qui s’occupe de nos armes avant chaque passage. Les personnages du Panthéon ne sont pas unidimensionnels comme vous pourriez devoir faire le choix entre une bénédiction ou l’autre et vous serez confrontés à un affixe supplémentaire durant une arène ce qui est intéressant puisque vous vous mettez à dos un allier ne serait-ce que temporairement. L’encouragement de la part du Panthéon pour ensuite être moqué par Hadès est une routine que le joueur doit accepter, mais le tout est si bien joué, ne tombe pas dans les références inutiles et continue de nous garder dans l’ambiance qu’est ce labyrinthe du Underworld. Pour être honnête, c’est comme si on jouait à Kid Icarus sous la perspective d’un Dark Pit plus ouvert sans que ce soit nécessairement Kid Icarus : on a un protagoniste qui fait un peu à sa tête tout de même reconnaissant des pouvoirs du Panthéon. Il faut savoir que Kid Icarus, surtout Uprising, était une caricature de la mythologie grecque alors que Palutena était une référence directe à Athena sans oublier Hewdraw (Hydra), Thanatos, Medusa ou Dyntos (le dieu de la forge Héphaïstos) et bien sûr Hadès lui-même. Hadès est en quelque sorte le grand patron de l’Underworld et il y a une séquence où on voit une rangée d’âmes (sûrement un groupe ramené par Charon) qui attendent leur tour.

Que dire de la présentation du jeu? Rien d’autre qu’un chef-d’œuvre visuel! Je savais que Supergiant était un studio composé de véritables artistes après avoir vu des images et séquences de Bastion, Transistor et Pyre. Voir le tout en animation de mes propres yeux dans Hades est certainement le meilleur moyen d’admirer le talent du studio de San Francisco. Le style isométrique et les restrictions imposées par la présentation 2D offrent à Hades une identité grâce à une excellente conception de personnages et les passages visités possèdent également une atmosphère d’enfer si je puis faire un mauvais jeu de mots. C’est sans oublier l’ambiance sonore qui renforce cette atmosphère, les sons des créatures, le bruitage pour le système de combat et je devrais également mentionner la majestueuse bande originale par Darren Korb qui récidive, lui-même étant compositeur maison chez Supergiant.

Vous me voyez venir. Quel serait le véritable point faible de Hades? Soyons honnêtes : le jeu est disponible sur PC (Steam, Epic), Mac et Nintendo Switch. L’éventuelle sortie de la prochaine génération de consoles chez Microsoft et Sony a probablement changé les plans de Supergiant, mais il est dommage que ce ne sont pas tous les consommateurs qui ont accès à ce titre. Cela dit, ce n’est pas une critique en soit. Cela dit, je n’ai eu aucun problème technique sur la version jouée (PC sur Steam) ce qui témoigne d’un excellent portage sans oublier le fait que le jeu se joue très bien avec votre clavier et souris si vous le souhaitez.

Avons-nous le jeu parfait? Pour vous, peut-être que vous allez trouver le système de combat répétitif. Peut-être que vous allez détester les dialogues, peut-être n’êtes-vous pas un amateur de la mythologie grecque. La question se pose ainsi : la perfection est-elle subjective? Bien sûr : certains trouvent en des jeux simples et peu profonds la perfection absolue (on pense à Journey), d’autres la trouvent à travers des projets Kickstarter qui ont réussi à offrir un jeu de plateforme sans faille absolue (Shovel Knight). Quelques-uns trouvent la perfection à même des jeux ultra-publicisés à grand budget. Hades répond à toutes mes attentes en tant qu’amateur de jeu vidéo. Il y a un peu de hasard qui est adhéré à un excellent système de combat. Tout jeu est répétitif, mais je ne le sens pas dans Hades puisque tout est réussi et ne me sort pas de l’immersion! C’est un des ces jeux où j’ai hâte d’échouer pour faire une meilleure progression ou tester différents pouvoirs du Panthéon!

Étant un amateur de la mythologie grecque, je suis fasciné de voir le respect tout en faisant ici une caricature de la hiérarchie de l’Olympe ou celle des Enfers. La jouabilité est intense, les morts qui arrivent sont nos erreurs, l’élément de choix et d’optimisation à travers les nombreux pouvoirs du Panthéon tout en combinant l’aspect du hasard n’est jamais frustant. La question ultime se pose donc : Hades a-t-il dépassé Shovel Knight comme étant le meilleur jeu d’un développeur indépendant auquel j’ai joué? Je ne puis dire puisque ce sont deux jeux complètement différents. Shovel Knight est le symbole du succès Kickstarter (avec Darkest Dungeon et Pillars of Eternity) alors qu’Hades est, avec Dead Cells, la représentation des bons côtés du système Accès Anticipé.

Verdict : Hades a tous les éléments que je souhaite et me fait apprécier un système généralement problématique! Pour moi, cela le rend plus symbolique. Il mérite sa place au Panthéon des grands jeux!

Points positifs:

  • Le thème et les éléments roguelite sont combinés de manière titanesque!
  • Zagreus, Hadès et tous les personnages des Enfers sont intéressants à écouter!
  • La jouabilité est intense, précise et meaty!
  • De sang et ténèbres: une histoire à démasquer à travers la progression!
  • Atmosphère sonore et musicale professionnelle!
  • La variété des pouvoirs du Panthéon amène un élément de hasard, choix et de confiance au joueur!
  • Les contrôles sur clavier/souris fonctionnent étrangement bien!

Fiche:

  • Titre: Hades
  • Développeur/Éditeur: Supergiant Games
  • Genre: Action à perspective isométrique avec des principes de type roguelite
  • Joueur solo
  • Langue: Voix anglophones, textes et menu en français disponibles
  • Disponible sur Epic Games Store, Steam et Nintendo Switch

Hades fut évalué à partir d’une version numérique achetée par l’auteur sur Steam. Bien que je n’aie pas atteint la surface après plus de 20h, je tenais à offrir mon verdict.